La maison du bonheur
« Faire tout mon possible pour rendre le client heureux, jusque dans les plus infimes détails, il n’y a que cela qui m’importe ». Mais pour y parvenir, Yves Camdeborde considère que rien ne doit être négligé : « pour moi, un restaurant est un tout. Si la qualité de la cuisine représente 50% de la réussite d’un repas, le sourire du serveur, l’extrême attention portée au client ou une jolie vaisselle participent, de la même manière, à son bonheur ».
Au commencement, il y eut Christian Constant
Ce devoir d’exigence et ce principe de cohérence globale, Yves Camdeborde estime qu’il les doit essentiellement à celui qui fût son maître au Crillon, celui-là même qui lui a ouvert les yeux et montré le chemin : « par sa sensibilité humaine et son ouverture d’esprit, c’est le cuisinier qui m’a le plus apporté. En me permettant d’oser et d’être moi-même, il a révélé ma personnalité comme personne, et l’a laissée s’exprimer sans jamais entraver ma liberté de créer, alors qu’à l’époque, les pratiques, en cuisine, étaient d’avantage d’ordre dictatorial ».
Tradition, créativité et ouverture sur le monde
Après les bienfaits de la Nouvelle Cuisine, dans les années 1970, « je crains qu’actuellement, le métissage culinaire parte un peu dans tous les sens et que, par son uniformisation, cette cuisine-fusion ne finisse par faire disparaitre l’exception culinaire française. C’est pourquoi, je m’appuie de plus en plus sur les bases de notre cuisine traditionnelle. Ce qui n’empêche pas d’alléger l’ensemble, d’enlever ce qu’il pouvait y avoir, autrefois, de lourd ou de gras, en y ajoutant quelques touches plus contemporaines. Mais, globalement, je veux que, dans ma cuisine, ça sente la France... Ce respect de la tradition ne veut surtout pas dire conformisme et académisme. Bien, au contraire. Ouvert sur le monde et curieux de tout, je nourri ma réflexion culinaire par mes innombrables voyages. Chaque jour, je me remets en cause et me mets en situation d’écouter, de lire et de m’ouvrir aux autres, pour rester vivant et capter l’air du temps ».
Tous les produits sont égaux
Alors que pendant longtemps, dans la haute restauration, seuls les produits dits « nobles » trouvaient grâce aux yeux des chefs qui négligeaient tous les autres, « je considère qu’un cuisinier doit travailler une carotte, une sardine ou un pied de cochon avec autant de respect et d’exigence que du caviar, un turbot ou un filet de bœuf. Mais pour cela, il faut sélectionner ces produits avec la plus grande attention, car, quels que soient leur prix, ils doivent être d’une qualité extrême ».
Textures d’origine et travail du goût
« Ce qui me passionne et me guide dans mon travail, c’est de retrouver la texture originelle d’un produit. Trop souvent, certaines cuissons altèrent sa texture, comme la cuisson sous-vide qui ramollit les chairs et uniformise son goût. Personnellement, j’aime cuisiner dans l’idée de restituer la vraie mâche d’une côte de bœuf ou d’un cabillaud. Le travail du goût est également au centre de ma réflexion. Notamment en sublimant la saveur d’un produit grâce à différents types d’assaisonnements qui jouent alors le rôle d’exhausteurs. Comme les parfums d’une épice, la fraicheur d’une herbe aromatique ou l’acidité d’un agrume ».